jeudi 4 décembre 2014

Pour ou contre l'automatisation des écluses


publié par Michelle




POUR OU CONTRE ?


LE PARISIEN                                               Articles publiés le 20.05.2014


1. « La téléconduite nous fera perdre du temps »


José Laval, secrétaire de la Chambre nationale de la batellerie artisanale

Il a passé sa journée dans la cabine de sa péniche plutôt que derrière la barre, bien malgré lui. Amarré devant les portes closes de l'écluse de Varennes-sur-Seine, sous un soleil de plomb, José Laval n'a rien pu faire d'autre que prendre son mal en patience durant la grève du personnel VNF. « Je perds environ 1 000 € par jour quand je ne peux pas naviguer, se lamente le batelier. C'est énorme pour un artisan comme moi. Mais je ne peux rien faire d'autre, je suis totalement dépendant des écluses. Et, en attendant, ce sont les autres moyens de transports qui en profitent. »

Si le secrétaire de la Chambre nationale de la batellerie artisanale estime que « les éclusiers auraient pu trouver un autre moyen de faire grève », il les soutient « à 100 % sur le fond de leur démarche ». « Le système de téléconduite que VNF veut mettre en place sur la Petite Seine ( NDLR : de Montereau-Fault-Yonne à Nogent-sur-Seine) est une aberration, estime le capitaine de péniche, qui sillonne la Seine depuis plus de vingt ans. Je l'ai testé ailleurs et je suis sûr que ça nous fera perdre du temps. Un éclusier ne peut pas gérer trois écluses à la fois. Quand il y a une personne par poste, les choses se passent mieux. » En contrepartie, le batelier pourra utiliser les écluses quatorze heures par jour lorsque la téléconduite sera mise en place, contre dix heures seulement aujourd'hui. « Cela ne servira qu'aux grosses entreprises qui peuvent demander à leurs employés de naviguer à n'importe quelle heure, s'exclame José Laval. Mais moi j'ai une vie de famille, dix heures par jour me suffisent. VNF ferait mieux d'améliorer les conditions de navigation sur la Petite Seine avant de s'occuper de la télé conduite. »

2. Les éclusiers de la Seine s'opposent à l'automatisation
Hier, la majorité des dix écluses qui jalonnent la Seine dans le département ne fonctionnaient pas. Les péniches n'ont donc pas pu naviguer.
Cygnes, canards et petits bateaux de plaisance ont eu le champ libre hier, sur la Seine, en amont de Paris. Les centaines de péniches qui sillonnent d'habitude le fleuve ont été forcées de rester à quai à cause d'une grève des éclusiers. En Seine-et-Marne, la quasi-totalité des dix écluses du département n'ont pas fonctionné de la journée à l'appel d'une intersyndicale de Voies navigables de France (VNF).
Un mouvement national qui vise notamment à mettre fin à une politique de réduction des effectifs.          Celle-ci passe notamment par la mise en place d'automatisation des ouvrages gérés par VNF, dont les grévistes demandent également l'arrêt. La mobilisation a été « particulièrement forte » en Seine-et-Marne, d’après la VNF, qui ne compte que 13 % de grévistes dans le bassin de la Seine.


Un nouveau système mis en place d’ici 2016

       De nombreux éclusiers du département se sont mobilisés, car ils seront les premiers touchés par la vague de modernisation. Un système de téléconduite va être mis en place d'ici à 2016 sur les écluses de la Petite Seine, entre Montereau-Fault-Yonne (Seine-et-Marne) et Nogent-sur-Seine (Aube). Les employés de VNF ne travailleront plus depuis leurs cabines de pilotage installées sur les barrages, mais depuis un poste de contrôle. « Cela permettra d'augmenter le trafic en gardant la même quantité de personnel, assure Alain Monteil, directeur de la direction territoriale du bassin de la Seine. » Mais les éclusiers estiment notamment que leur délocalisation va « entraîner des lenteurs » et « augmentera le risque d'accidents ». « Le projet, en l'état, est trop dangereux, assène l'un d'eux. Comment fera-t-on en cas de crue ? » Les négociations menées hier entre syndicats et direction n'ont pas abouti. La grève est donc reconduite aujourd'hui et pourrait durer jusqu'à mercredi midi.


3. Article publié dans le journal L’INDEPENDANT
             
                                                29 novembre 2014
Les premiers rayons de soleil arrivent enfin et la saison touristique démarre doucement sur le canal du midi. L'axe de tourisme fluvial qu'est le canal du Midi et ses 10 000 bateaux par an, dont 7 000 sur Trèbes, va voir son activité aller crescendo au fil des semaines. C'est le moment pour les éclusiers de retrouver leurs postes. Du 1er novembre à la mi-mars, ils effectuent les travaux d'entretien et de réparation, c'est la période de chômage du canal, issue d'un terme de batellerie très ancien qui signifie tout arrêt de navigation et d'alimentation. Ce métier d'éclusier a subi une mutation importante. Jusqu'aux années 1990, le passage de l'écluse se faisait manuellement. De grandes familles d'éclusiers vivaient sur place et bien souvent de père en fils, ils faisaient passer les bateaux en tournant de lourdes manivelles.                                        
Une importante mutation                                                                                                                                      
Après 1990, la mécanisation des écluses est intervenue et un petit moteur et son boîtier qui lève les portes autour de la taille de l'éclusier ont remplacé ces manivelles. Cette phase d'automatisation a vu le travail se moderniser : l'homme s'est mis aux manettes et aujourd'hui, l'éclusier est là pour accueillir, surveiller et faire en sorte que le passage à l'écluse du bateau et de ses occupants se fasse en toute sécurité. Il est responsable du fonctionnement de l’écluse à laquelle il est affecté et participe aux travaux d’entretien. Il réceptionne les avis de mouvement des bateaux quittant l'écluse précédente ; il émet lui-même les avis de mouvement des bateaux quittant son écluse et tient le registre de leur passage. Il informe aussi la gendarmerie fluviale de tout cas de pollution. Il accueille les usagers (mariniers et touristes)  Il contrôle les vignettes autorisant les plaisanciers à circuler sur le réseau des Voies Navigables de France (VNF)

Bientôt un concours
L'éclusier est un agent d'exploitation et d'entretien assurant la navigation, veillant au niveau de l'eau et surveillant le domaine public fluvial. Dans les prochaines années, les éclusiers seront des agents fonctionnaires d'Etat, reçus sur concours administratif, relevant de l'exploitation des voies navigables, tout simplement.
 4.Témoignage d’un éclusier ravi de l’automatisation
Philippe est éclusier sur le Canal de Briare depuis 1980. Cette écluse, il la connaît bien : il y est né ! Après un BEP de mécanique générale, il a pris la succession de son père puis a passé un concours interne  qui lui a permis d’être titularisé sur son poste en tant qu’agent d’exploitation.

« J’ai toujours souhaité être éclusier : c’est un choix de vie. J’aime cet endroit et je fais en sorte que les gens de passage l’apprécient aussi : il y a des fleurs, des couleurs, c’est propre et accueillant. Lorsque j’ai débuté, l’écluse était manuelle. Aujourd’hui tout est automatisé : le travail est moins physique et l’on peut consacrer plus de temps et d’attention à nos visiteurs. Les relations humaines font tout autant partie de mon travail que les travaux d’entretien et autres tâches plus techniques. Lorsqu’un bateau arrive, je l’accueille et veille à ce qu’aucun incident ne survienne (problèmes d’amarrage, problèmes techniques d’ouverture et de fermeture… 3Pendant leurs 7-8 mn de stationnement entre les portes de l’écluse, je vérifie s’ils ont leur vignette de navigation, les papiers du bateau et je remplis un registre de passage. Les renseignements permettront par la suite d’établir des statistiques sur le trafic fluvial. Les passages d’écluses se font entre 6h30 et 19h30. Sur un écran d’ordinateur, on peut suivre le fonctionnement des écluses et le trafic de bateaux sur le tronçon des 8 écluses qui nous concerne : à chaque ouverture de portes, le passage est automatiquement enregistré. En plus du personnel sur écluse, il existe également une surveillance voiture sur le chemin de halage. Le rythme de l’écluse varie selon le trafic des bateaux : d’avril à octobre c’est la saison la plus active, notamment grâce au tourisme (90 % du trafic). Pendant l’autre moitié de l’année, le trafic est plus faible, c’est la période dite "de chômage". On en profite alors pour entretenir le canal et l’écluse et entreprendre des travaux d’importance : on nettoie, on cure... on casse aussi la glace en hiver ! »
                                                                                         
 Agence de l’eau, site des juniors


Ecluse automatisée de Moret

mardi 2 décembre 2014

Poème La revendication des canaux



publié par Patrick

La revendication des canaux

Les canaux ont dit : «  Nous avons plein le dos,
Nous avons plein le dos d'être des canaux latéraux.
Oh !d'abord, sortir d'une source,
Une source, avec de la mousse,
Et des petites fleurettes autour,
Et des bergers qui parleraient d'amour!...
Mais de bergers, de bergères, bernique !...
Nos Naïades et nos Tritons sont
Des ingénieurs des Chaussées et des Ponts :
Et nous sortons de l'Ecole Polytechnique.
On aggrave encore notre sort
En nous affublant de noms à coucher dehors,
De noms dénués de toute poésie :
Nous ne prétendons pas qu'on nous dise Voulzie,(1)
Mais enfin était-il besoin
De nous appeler les canaux de l'Ourcq ou du Loing!...
Et les écluses, non, mais, les écluses !...
Croyez-vous que ça nous amuse ?
Tantôt en bas, tantôt en l'air,
 Montagnes sinistrement russes
C'est à nous donner le mal de mer,
Les écluses !...
Ah ! Pouvoir parmi les prés
Serpenter à notre gré,
Faire des circuits, des zigzags,
Avoir des tourbillons, des vagues,
Déborder aussi quelquefois :
Ah ! Ne plus marcher toujours droit !
Regrets superflus, plaintes vaines,
Aujourd'hui, tout comme demain,
Comme hier, comme après-demain,
Et les jours des autres semaines,
Nous suivons le même chemin
Rectiligne, sans imprévu, toujours le même :
Car nous sommes les mornes canaux,
Aux rives monotones et tristes,
Que des ingénieurs peu artistes
Tracèrent, en s'appliquant, avec leurs niveaux
Et nous berçons notre mélancolie
Au rythme lent du pas des ânes et des mulets,
Qui traînent les bateaux plats, pesants et laids,
Chargés de charbon ou de poteries. »


                              Maurice Etienne Legrand dit ( Franc- Nohain) 1872-1934

(1) La Voulzie est un rivière de Seine et Marne qui prend sa source à  Voulton, 8kms au nord de Provins, traverse la ville et se jette dans la Seine à Saint Sauveur les Bray (43,90 km de cours )

vendredi 28 novembre 2014

Vocabulaire de l'écluse à sas


écluse à sas

Source:VNF

Ecluse de Jaulnes

                                                                           publié par Pascale



Carte de l'écluse de Jaulnes 1884

Source AD77 Barrage éclusé de Jaulnes :acquisitions de terrains pour la construction (1881-1897) Travaux d'améliorations et d'entretiens (1924) Cote 3SP37

Cartes des écluses sur la Seine de Montereau à Melz sur Seine


publié par Pascale


écluses de Bray sur Seine, de Jaulnes, du Vezoult, de Villiers sur Seine et de Melz sur Seine


carte 1896 de la navigation de la Seine: écluse de Marolles et de Bazoches les Bray


Source Archives Départementales 77:Dérivation éclusée de Bray sur Seine à la Tombe 1893-1925 cote 3SP33 

Ecluse de Marolles sur Seine

publié par Pascale





Avant les travaux ,existait  une écluse de 45 m de longueur et 8 m de largeur au droit des têtes qui a été conservée

La nouvelle écluse est implantée à l'extrémité aval de la dérivation de Marolles,parallèlement à l'ancienne écluse.Les caractéristiques sont les suivantes:la longueur utile du sas est de 185 m la largeur du sas au droit des têtes est de 12 m

La cabine de commande est constituée de deux volumes parallélipédiques superposés.A la partie inférieure se trouve la centrale de commande hydraulique commandant quatre vérins de manoeuvre, les portes et des vannes d'aqueduc.Le poste de commande est situé à la partie supérieure à environ 4 m au dessus des terre pleins

Les têtes ont été réalisées suivant un mode de construction classique sur la Haute Seine. Il comporte pour chaque tête, la construction d'un batardeau circulaire.Les batardeaux ont un diamètre de 26 m, les palplanches ont 11,6 m  de longueur dont 3,6 m de fiche sous radier en béton immergé

La conception du sas : les bajoyers sont indépendants, en palplanches métalliques , habillés par un voile de 90 cm de béton ,.Un radier de 1 m d'épaisseur en béton immergé

Les équipements du sas : des bollards , croix d'amarrage et échelles espacés tous les 23 m.Un éclairage avec un lampadaire tous les 30 m 

Les estacades


source AD77 "Aménagement à grand gabarit de la petite Seine de Montereau à Bray sur Seine "J.L Delambre J PLessis Editions de la Navigation du Rhin Strasbourg 1974 Cote AZ 125.14


lundi 24 novembre 2014

Chants de Marins - Les répertoires - Chants de mariniers

publié par Mireille


Les mariniers ont joué un très important rôle de vecteur d'échanges culturels entre les différentes traditions orales dans toute la France. Dans chaque grand bassin de navigation, ces voyageurs colportent des chansons en même temps que leurs marchandises. Sur la Loire, les gens des "Pays hauts" descendent du Bourbonnais jusqu'à Nantes sur leurs sapines et remontent à pied la vallée, diffusant tout au long de leur passage les chansons qu'ils ont entendues dans le grand port maritime. Pour les mariniers de la Dordogne, de l'Isle, du canal du Midi, etc., Bordeaux est une plaque tournante où s'échangent les répertoires, au contact des long-courriers, des terre-neuvas venus décharger le produit de leur campagne, des caboteurs et des pêcheurs de Gironde. Lyon a un rôle analogue, mettant en contact les bateliers de la Saône et du Rhône, permettant ainsi aux traditions méditerranéennes de remonter loin vers le Nord….



De Lyon notre départance
    Avec que trois bateaux chargés
    Chargés de bois pour la marine
    En Arles notre destinée.

    De là en suivant notre route
    Jusqu'à Condrieu gaillardement
    Nous avons bronqué sur la pile
    Ah mes amis, ah quel tourment


Péniches et fumées à Courbevoie, 1908 Albert Gleizes

L'Ecluse de Suresnes, 1908 Albert Gleizes

chants-marins.info/mariniers.html



dimanche 16 novembre 2014

La Vie des bateliers

publié par Danièle


La vie des bateliers
La plupart du temps, on ne devient pas batelier, on nait batelier. Dès l’âge de 5 ans, les enfants apprennent à naviguer sous la surveillance attentive de leurs parents. Pour devenir batelier, il faut un CAP et une expérience de la navigation, souvent avec les parents. C’est également fréquent que leur première péniche soit payée par les parents. Le marinier gagne peu malgré le nombre d’heures travaillées. De plus, les bateliers doivent verser une cotisation obligatoire. Il faut avoir le goût du voyage, de l’indépendance et de la liberté... Ce sont, en quelque sorte des « gens du voyage).

Pour les mariniers, le principal risque à bord est de tomber à l’eau, toujours présent, avec ses risques d’hypothermie lorsqu’il fait froid. Pour les enfants, surtout en bas âge, c’est le risque de noyade qui est le plus important. C’est pourquoi on peut attacher les plus jeunes grâce à un harnais, ce qui est parfois une mesure indispensable, même si elle surprend les « gens d’à terre ». Pour tous, le gilet de sauvetage peut permettre d’éviter le drame. Les câbles et cordages, maintenant en nylon) doivent être maniés avec beaucoup de précaution. Un pied qui se prend dans un câble, et c’est la chute assurée, voire une jambe coupée!

Il vaut mieux avoir le sens de l’équilibre et faire attention lorsqu’on parcourt les plats-bords (50cm de large) plusieurs fois par jour. En effet lorsque la péniche est à vide, elle est peu enfoncée et les plats-bords surplombent de 2,5 m le niveau de l’eau. La péniche elle-même est constamment soumise aux risques de la navigation. Celle-ci peut s’avérer particulièrement dangereuse par temps de brouillard lorsque ni les ponts, ni les autres bateaux ne sont visibles. De nos jours les recours au radar et au radiotéléphone sont appréciables. Pareillement, lors des  grands froids, la glace devient le pire ennemi du batelier. A moins dix degrés, il faut briser tous les jours la glace qui se forme autour du bateau pour protéger la coque lors du dégel.
La vie domestique :
Vivre sur l’eau rend plus pénible les tâches de la vie de tous les jours. A chaque chargement ou déchargement, des poussières de charbon, de sable, de ciment ou de blé se déposent et il faut recommencer à faire briller les carreaux, les parquets et les cuivres qui font la fierté de la marinière. D’ailleurs, on n’entre jamais dans la timonerie ou la cabine avec ses chaussures ! Il faut également apprendre à s’organiser en fonction des horaires de navigation, de l’itinéraire, de la longueur du voyage, en particulier pour l’approvisionnement en nourriture et en eau. Heureusement, avec la mise en place de petites citernes sur la péniche, ce n’est plus la peine d’aller chercher l’eau à terre à la pompe à bras ! Le batelier fait des réserves de provisions pour plusieurs semaines car les écluses sont de plus en plus automatisées. Sur le bateau, le travail, les tâches domestiques et les loisirs sont totalement imbriqués. Polyvalente, la marinière participe, en plus des tâches ménagères, à tous les aspects de la vie à bord : navigation, manœuvres, chargements, entretien, comptabilité, gestion…elle est à la fois femme d’intérieur et matelot, parfois même capitaine et chef d’entreprise. Lorsqu’un marinier meure ou que le couple divorce, la femme peut se retrouver en situation difficile car les marinières sont peu considérées.  Quant aux enfants de batelier, ils étaient peu scolarisés malgré la loi de Jules Ferry qui imposait une scolarisation obligatoire (mais pas l’école !). Des instituteurs ambulants ont vu le jour dans l’année 1930 mais sans grand succès. Il faudra attendre 1954 pour que des écoles nationales d’enfants de mariniers apparaissent. Ce sont des internats et les parents bateliers passaient les voir au gré de leur route de navigation. Actuellement, avec les ordinateurs le suivi des études est plus facile.
L’entretien :
Outil de travail et lieu de vie du marinier, la péniche est l’objet de tous les soins. Pour elle, les mariniers deviennent menuisiers, peintres, mécaniciens, électriciens, plombiers… Avec la généralisation des automoteurs et des bateaux en fer, le marinier ne se bat plus contre les fuites mais contre les problèmes mécaniques et les risques de corrosion. La cale doit toujours être propre et étanche surtout lorsqu’on charge des produits dangereux comme les sulfates de fer, de cuivre ou d’ammoniaque. Les mariniers profitent de la belle saison ou de l’attente entre deux voyages pour donner un coup de pinceau par-ci, de pince à souder par-là… Au bout de quelques années, la peinture et le gazage de protection disparaissent et il est recommandé de mettre la péniche « en cale sèche » au chantier naval afin de réparer la partie immergée de la coque. Attendre la limite réglementaire de 5 ans, c’est s’exposer à des réparations beaucoup plus importantes et plus coûteuses. Les ouvriers des chantiers navals entretiennent et réparent les péniches. Il y a le chaudronnier qui s’occupe de la coque et des structures en fer, le soudeur, le mécanicien pour le moteur, l’électricien et le menuisier pour la timonerie et la cabine.
Le chargement et le déchargement :
Il n’y a pas si longtemps, charger des marchandises dans la péniche et les décharger prenait plusieurs jours. Il fallait une dizaine de jours pour transporter 300 tonnes de charbon dans la cale à l’aide de paniers appelés « mendes ». Le charbon ordinaire ne nécessitait pas de tels soins et on pouvait utiliser de longues glissières en bois, ou encore basculer des petits wagons de charbon dans la cale à l’aide d’entonnoirs, les « trémis ». Les produits agricoles étaient chargés à la brouette et il fallait 2 ou 3 jours pour les décharger …à la fourche ! Le marinier et toute sa famille s’activaient comme les autres. Aujourd’hui, les grues, les tracteurs et les glissières mécaniques simplifient le travail des mariniers et des dockers et limitent à quelques heures les opérations de chargement et de déchargement. Les marchandises doivent être bien réparties dans la cale pour éviter qu’une partie du bateau soit plus enfoncée. Pour charger des céréales qui s’écoulent d’un silo, le marinier doit avancer ou reculer son bateau pour les répartir, et même parfois effectuer un demi-tour pour équilibrer les côtés gauche et droit. Traditionnellement, ce sont les marchandises lourdes non périssables et peu fragiles qui sont transportées par voie d’eau : céréales, engrais, sel, substances chimiques, matériaux de construction, produits pétroliers, charbon, ciment, graviers et même des éléments de la fusée Ariane ou des réacteurs nucléaires…Aujourd’hui des matériaux plus fragiles (ordinateurs, télévisions…) sont aussi transportés par bateaux, dans des containers.



La navigation :
Avant le XIXème siècle, les bateaux ne comportaient pas d’espace d’habitation. Le marinier partait pour des voyages courts et rejoignait régulièrement sa famille installée à terre. Au XIXème siècle, le développement du réseau des voies navigables permet au marinier de faire des voyages toujours plus longs et plus lointains et toute la famille vient s’installer à bord. Les mariniers deviennent de véritables nomades. A l’époque des bateaux en bois, la cabine se situe au milieu de la péniche. Tout le mobilier utile est concentré dans ce petit espace de 20m carré : table, chaises, lits, poêle à charbon, cuisinière, armoire, penderie… Grâce à des trappes et des placards, chaque recoin est utilisé. La timonerie ou « marquise » est vitrée des quatre côtés ; on pouvait enlever le haut (quand il faisait chaud ou lors d’un passage sous un tunnel bas) mais si il pleuvait, tout était mouillé. Actuellement, il existe un système de ballastage pour passer sous les ponts. Dans les bateaux en fer construits au XXème siècle, la cabine est de mieux en mieux équipée. On y trouve en plus de la timonerie, une cabine avec deux chambres, une salle, parfois une cuisine avec un lave-linge, un réfrigérateur, une télévision, des radiateurs…L’alimentation électrique provient d’un groupe électrogène ou de la batterie du moteur qui fournit de l’électricité en 24 volts. Un transformateur permet de passer de 24 à 220 volts si nécessaire. Ainsi la cabine n’a rien à envier aux habitations « d’à terre ».
Le passage des écluses :
Jusqu’au XIXème siècle, le principal moyen de déplacement le long des rivières et des canaux est le halage. Cette méthode consiste à tirer un bateau depuis la rive avec une corde reliée au mât.
Le halage « à col d’homme » s’appelle aussi halage « à la bricole », d’après le nom du harnais attaché autour de la poitrine des haleurs. Ils avancent arc-boutés, ce qui leur vaut le surnom de « ramasseurs de persil » ! Lorsque le chemin de halage est suffisamment large, le bateau est halé par un attelage de chevaux, d’ânes, de mulets ou de bœufs. Parfois, il suffit de suivre le courant, ou lorsque le vent est favorable, de hisser une grande voile, la sémaque. Ces haleurs à la bricole avancent à une vitesse de 800m/h. Souvent le chemin de halage change de rive et ils perdent du temps à traverser le fleuve. Lorsque les péniches étaient halées depuis la rive, le marinier pilotait grâce à une barre horizontale qui lui permettait d’orienter le bateau. Avec l’arrivée du moteur, la barre est devenue une roue, appelée « macaron ». Parfois un petit moteur situé à l’avant du bateau, le propulseur d’étrave, permet de mieux contrôler la direction. Enfin, dans la timonerie, le tableau de bord comporte de multiples appareils de contrôle, de mesure et de communication : manette en guise de macaron, boussole, compte-tours, thermomètre, ampèremètre, manomètre, sonar, radar, interphone… La navigation sur les canaux rectilignes, où se succèdent les écluses, est très différente de la navigation sur les fleuves et les rivières, au cours sinueux et irrégulier. Mais dans tous les cas, le bateau réagit lentement aux manœuvres : son poids et son inertie nécessitent d’anticiper les passages délicats et de ralentir plusieurs centaines de mètres avant d’arriver à une écluse ou de croiser un autre bateau (quelques dizaines de mètre si la péniche est vide). Au XIXème siècle, sur les fleuves et les rivières navigables, le halage laisse place à un remorqueur à vapeur qui avance grâce à de grandes roues à aubes puis grâce à une hélice (à partir des années 1860). Le moteur diesel remplace progressivement la vapeur à partir des années 1920. Ce remorqueur tire des convois de cinq péniches de 300 tonnes chacune. Certains remorqueurs pouvaient tirer jusqu’à 15 bateaux, par exemple sur la Seine entre Paris et Conflans-Sainte-Honorine. Pour passer dans certains canaux souterrains, on utilisait un toueur à vapeur, ce qui obligeait les bateliers à supporter leur épaisse fumée noire pendant toute la traversée du tunnel. Un toueur est un bateau-treuil qui se tire lui-même à l’aide d’un câble fixé à terre. Il fonctionne à la vapeur ou à l’électricité. La chaîne peut être fixée aux deux extrémités et le toueur peut avancer dans les deux sens, le long de la chaîne qui s’enroule et se déroule au passage des bobines. Sur les rivières, le toueur est plutôt équipé d’un câble fixé seulement en amont. Pour remonter le courant, le câble s’enroule sur l’énorme bobine du toueur.
Par exemple, le canal de Saint-Quentin comporte le souterrain de Riqueval qui mesure 5,670kms de longueur creusé à même la roche de 1802 à 1810 à la demande de Napoléon 1er. Au début du XIXème siècle, il fallait huit hommes pour tirer une péniche d’un bout à l’autre du souterrain. Ils mettaient 12 à 14 heures pour traverser ce tunnel dans l’obscurité. Aujourd’hui, les péniches transitent, moteurs éteints, tirées par un toueur, bateau treuil électrique, alimenté par un courant continu de 600 volts. Le toueur se déplace à 2,5km/h en se halant à l’aide d’une chaîne fixée au fond du canal. Lorsqu’on va dans le sens du courant, il suffit de le laisser se dérouler.
 Le long des canaux, le halage traditionnel reste le seul moyen de tirer une péniche jusqu’à la fin du XIXème siècle. On voit ensuite apparaître le halage mécanique sur les berges des canaux, avec l’installation de tracteurs à vapeur, puis de locomotives à vapeur sur rails, d’engins sur pneus, de tracteurs électriques et enfin de tracteurs à moteur. Leur vitesse est de 4-5km/h. Apparait  également l’aéropropulsion avec une hélice hors de l’eau. Mais cette méthode ne marche pas.

L’introduction du moteur a modifié l’architecture de la péniche. La cabine est passée à l’arrière. La barre franche a laissé la place à la barre à roue (le « macaron ») qui permet de diriger le bateau par un système d’arbre à transmission jusqu’au safran. Le capitaine peut désormais piloter sa péniche depuis un espace couvert : la timonerie. La réduction du gouvernail est compensée par la force du moteur.

Parallèlement à l’apparition du moteur, on assiste à un changement fondamental pour les péniches : elles ne sont plus construites en bois mais en fer. L’invention du moteur à combustion interne constitue une révolution pour les mariniers : désormais la péniche est automotrice et libre de se déplacer quand elle veut et où elle veut. Les automoteurs représentent 20% du parc des péniches Freycinet en 1935 et pratiquement 100% en 1970. Aujourd’hui, les haleurs, les toueurs et les remorqueurs sont les souvenirs d’une époque révolue. La dernière péniche à être tirée par des chevaux disparait en 1969. De même, les câbles d’amarrage autrefois en fer sont remplacés par du nylon, diminuant les risques, notamment de perdre une jambe lors des manipulations de cordes.
Depuis, l’étendue du réseau navigable a peu évolué en France. En 1986, environ 6% seulement des marchandises étaient transportées par voie d’eau en France et 12% à l’extérieur de la France. On comptait alors 2800 bateliers. Une partie des réseaux a été modernisé pour permettre le passage des grands automoteurs et des pousseurs à barges (bateaux de 1000 tonnes et plus). Le trafic se concentre sur les axes à « grand gabarit » (il y a 1730 km de voies à grand gabarit en France aujourd’hui) : la Seine, le Rhin et l’axe Dunkerque-Valenciennes. Malgré le faible coût de transport (18 centimes pour une péniche contre 25 centimes par le rail et 45 centimes par la route) le transport par péniches reste moins important que les autres transports...
Luttes sociales de la batellerie :
En 1879, le président Jean Orevy Freycinet décrète que toutes les voies d’eau fassent le même gabarit : nait alors la péniche Freycinet Sous la troisième République, environ 35000 bateliers. La lutte du XXème siècle voit naitre les artisans bateliers indépendants. En 1904 surviennent les premières batailles pour créer un groupement général de la batellerie. L’affrètement se fait par les mariniers eux-mêmes. Une première grève est brisée car les marchandises étaient acheminées par le rail. La crise de 1930 voit diminuer le transport par péniches. En août et septembre il y a eu des grèves générales dans plusieurs villages. Des matelots de la Marine Nationale ont embarqué sur des remorqueurs, rompant ainsi les barrages. Après une courte résistance, les mariniers ont fini par reprendre le travail. Le 18 juillet 1936 ce fut la victoire du tour de rôle instaurant ainsi un partage solidaire du travail. Les mariniers avaient un numéro d’inscription et il fallait attendre que le marinier suivant prenne le tour de fret avant l’autre marinier. Les mariniers ont aussi participé aux grandes grèves du Front National. En 1973, la batellerie connaît des années de crise quand la chute du fret diminue les transports fluviaux. Les mariniers attendaient souvent un mois avant un nouveau transport. En 2000, arrêt du tour de fret et mise en place de contrats à une bourse d’affrètement.
Rôle des péniches lors de la première guerre mondiale :
Elles se sont transformées en porte-canons ou en canonnières et servaient également à l’approvisionnement des lignes de front. Des marins de la Marine Nationale étaient embarqués.


Source : le musée de la batellerie de Longueil-Annel dans l’Oise, près de Compiègne.